J’avoue qu’en préparant l’interview de l’adjudant-chef Michel, je ne pouvais m’empêcher d’être légèrement envieux… C’est en effet le chef de service de l’équipe de photographes et vidéastes de la PAF et de l’EVAA. Si vous pouvez admirer de magnifiques photos de la PAF en vol, dites vous qu’il était certainement de l’autre coté de l’objectif.
Mais avant de parler de son métier et de son rôle au sein de cette équipe, revenons un peu sur son parcours. L’adjudant-chef Michel rentre à 17 ans à l’École d’Enseignement Technique de l’Armée de l’Air. Elle est située à sur la BA 722 à Saintes. Il y passera son baccalauréat. Son diplôme en poche, il choisira la spécialité « photographe ».
Il poursuivra sa formation à l’École de Formation des sous-officiers de l’Armée de l’Air sur la BA 721 de Rochefort. A l’issue de cette formation, il est affecté sur la BA 921 de Taverny en tant que photographe. Puis il rejoindra la BA 709 de Cognac.
C’est là que se jouera son premier pas vers la PAF. En effet, sur cette base aérienne, officiait une patrouille bien connue des amateurs et des passionnés. Vous l’aurez reconnue, il s’agit bien entendu des « Cartouche Doré ». Volant sur trois avions TB 30 Epsilon, certains la considéraient comme la « petite soeur » de la PAF. Ce fut l’occasion pour l’adjudant-chef Michel de découvrir le monde du meeting. Il prit en charge de filmer les entrainements. C’est aussi lui qui développera le site de la patrouille. Enfin, il réalisera les photos pour alimenter le site.
Puis en 2011, il franchira le pas et postulera au poste de photographe qui venait de s’ouvrir à la PAF. En 2013, il deviendra le chef de service de l’équipe de photographes et vidéastes de la PAF et de l’EVAA. Depuis bientôt 12 ans, il œuvre au sein de cette équipe. Elle compte actuellement 4 photographes/vidéastes. En temps normal, on compte 2 personnels pour la PAF et pour l’EVAA. Cependant, ce ne sont pas des affectations définitives et en fonction des besoins, ils peuvent passer de l’un à l’autre.
Un premier secret
Si vous pensiez que le rôle premier d’un photographe de la PAF est de prendre des photos, vous vous méprenez.
La fonction première, la mission essentielle, c’est d’abord assurer la sécurité des vols. En effet, tout est filmé, depuis le premier entrainement jusqu’au dernier meeting. Ce rôle est à ce point primordial, que s’il n’y a pas de photographe au point central, il n’y pas de vol. Car, au delà, de la captation des images, le photographe est aussi en charge de la mise en place des systèmes radios au point central.
Le point central
Point central : mais qu’est-ce donc ? C’est le point qui sert de référence pour les présentations de la PAF. C’est là que s’installe le photographe ainsi qu’un observateur. Ce poste d’observateur peut être tenu par Athos 9, le pilote remplaçant de la PAF. Ce peut être aussi le directeur des équipes, son directeur adjoint ou encore le directeur des opérations.
L’installation se fait 30 minutes avant le début de la démonstration. C’est à partir de là que va se jouer la sécurité du vol (risque aviaire, avion dans le circuit, etc.). Il précise aussi les dernières infos telle que la météo au leader. C’est aussi le point d’échange radio avec la PAF. En effet, pour des raisons de sécurité, les organisateurs de meeting ne communiquent pas directement avec la PAF une fois en vol. Tout passe par le point central.
Pour les spotters, repérer le point central est l’assurance de pouvoir faire de belles photos de croisement. Aussi, si vous venez admirer la PAF lors d’un meeting, essayer de le repérer pour profiter du meilleur emplacement.
Un second secret
Maintenant que vous êtes bien placé, pour réussir vos photos de croisement, repérez l’avion avec le fumigène bleu. C’est toujours l’avion qui est placé le plus proche du public. C’est donc lui qu’il faut suivre pour vos photos de croisement.
La préparation du ruban
C’est au cours de l’hiver que va s’élaborer la construction du ruban. Pour les non-initiés, le ruban c’est l’enchainement des figures que présente la PAF. La construction du ruban est l’apanage du leader (Athos 1) , du premier solo (Athos 5) et de l’extérieur gauche (Athos 7) qui sont les plus anciens en poste. Il vont travailler sur les formations, les figures et les enchainements. Puisque le service photo possède des années de vidéo de prestations, il est fréquent qu’il soit consulté pour fournir de la matière. Il peut aussi les orienter car la captation vidéo ne rend pas la même perception que l’œil humain.
Il faut garder en mémoire une des spécificités de la PAF. C’est la seule patrouille au monde qui intègre chaque année 3 nouveaux pilotes. De plus, chacun des pilotes change de place à la fin de saison. En conséquence, chaque année, quelque soit leur ancienneté, ils doivent de nouveau s’approprier chaque figure comme pour la première fois.
Et la photo dans tout ça ?
Vous l’avez déjà compris, la sécurité est le maître mot même pour les photographes de la PAF. Ont-ils encore le temps de faire des photos « artistiques » ? Je vous rassure tout de suite. La réponse est oui. C’est en effet leur deuxième mission. Si à son arrivée, il y a 12 ans, l’adjudant-chef Michel n’avait qu’un site internet à alimenter, les choses ont bien changé. Il n’y avait initialement qu’un seul photographe. Les besoins en communication augmentant, un second le rejoignit. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux et la demande croissante d’images, ils sont 4.
De même le matériel évolue. Pour des images toujours plus immersives, on installe des Go-Pro dans les avions. Pour autant, rigueur militaire oblige, le service ne souffre aucun passe-droit. Les achats de matériel (boitier, objectifs accessoires) sont achetés par le circuit habituel avec les mêmes process que le service communication des autres bases aériennes.
Pour les photos, le service travaille actuellement sur la plaquette des Ambassadeurs avec les tenues bleues si caractéristiques. Il y avait aussi la préparation de la semaine à Solenzara. Cette semaine était dédiée à l’entrainement au-dessus de la mer. En effet, de nombreux prestations ont lieu au-dessus des plages de France. Il convient donc se préparer à cet environnement dans lequel l’illusion d’optique ou la perte de repère peuvent se produire. Ce sera aussi l’occasion de rapporter de belles photos.
Dans les airs
Si pour le commun des mortels, la photo depuis le plancher des vaches semble naturelle, la photos en « air to air » présente plus de mystère. Pour les photographes de la PAF, deux cas de figure se présentent.
Dans le premier cas, ils vont réaliser ce qu’ils nomment des photos « intérieur patrouille ». Ils choisissent un des avions de la PAF, pour les angles qu’il peut offrir. Ils s’installent en place arrière. Puis ils laissent la présentation se faire. Pas question d’interférer avec le pilote ou de déranger la patrouille. Cela permet des vues spectaculaires mais sur lesquelles manque toujours un avion.
C’est pourquoi ils profitent des vol de transit pour faire des photos de la patrouille à 8 avions. Il arrive aussi que des séances photo plus importantes soient organisées. Là aussi, les photographes sont force de proposition mais au final, ce sont les équipages des avions mis en œuvre qui valide la séance et son déroulement.
Nous avions encore plein de questions mais le moment arrivait de se diriger vers le point central pour le premier entrainement de la journée…
Je voudrais remercier très chaleureusement l’adjudant-chef Michel pour le temps qu’il a bien voulu nous accorder. Les magnifiques photos de la Patrouille de France que vous pouvez admirer dans cet article nous ont été fournies par l’adjudant-chef Michel. Elles ont été prises lors de l’entrainement du matin.
Si vous souhaitez plus de photos de la Patrouille de France, vous pouvez trouver le livre de l’adjudant-chef Michel et du sergent-chef julien aux éditions Equinoxe, paru en 2017, « Patrouille de France – Entre ciel et terre ».